Des pays hospitaliers
Depuis le tsunami de décembre 2004, plus personne n'ignore que des Occidentales se rendent dans la station balnéaire de Phuket, en Thaïlande, pour y faire refaire leur poitrine. On sait moins que des patients prennent aussi l'avion pour se faire opérer d'une hernie ou des ligaments du genou. Ces «malades voyageurs» sont de plus en plus nombreux, et leurs motivations, multiples. Certains cherchent ailleurs les équipements et les compétences qu'ils ne trouvent pas chez eux. D'autres veulent simplement alléger l'addition de l'intervention ou raccourcir le délai d'attente. Leur exil, en tout cas, est généralement motivé par des pathologies lourdes dans les domaines de la cardiologie, de la cancérologie ou de l'ophtalmologie. Un petit nombre de pays concentre l'essentiel de ces flux, selon l'analyse que vient de réaliser la direction de la société Europ Assistance. Le tiercé gagnant des pays les plus «hospitaliers»? La chirurgie esthétique en Inde, à Cuba et en Tunisie.
La réputation des chirurgiens indiens s'étend, en effet, bien au-delà des frontières de leur pays. Ces praticiens très qualifiés, nombreux à avoir travaillé à l'étranger, attirent depuis longtemps les patients des nations voisines et du Moyen-Orient. Depuis peu, des Britanniques découragés par les listes d'attente de leurs établissements nationaux débarquent à leur tour. Des Américains d'origine indienne font aussi le voyage. Outre-Atlantique, la couverture maladie se révèle minimale et les interventions sont très coûteuses. Une opération du cœur, par exemple, revient à environ 32 000 euros aux Etats-Unis et 16 000 euros en Europe, contre moins de 3 000 euros en Inde. Au total, 100 000 étrangers sont venus se faire soigner dans ce pays en 2003. Selon le cabinet de conseil McKinsey, le tourisme médical y génère 270 millions d'euros en entrées de devises. Ce montant pourrait atteindre 1 milliard d'euros en 2012.
Un outil politique
A Cuba, la médecine est davantage un outil politique qu'une arme économique. Le pays en tire une aura certaine. Depuis la révolution emmenée par Fidel Castro, les autorités financent en effet des équipes de recherche bien placées dans la compétition internationale. Le niveau de son système de santé a permis à Cuba de devenir le pilier d'un dispositif humanitaire international lancé en 1988 après le passage dans la région de l'ouragan Mitch. Grâce à ce Programme de prestations de soins médicaux intégraux pour l'Amérique latine, les Caraïbes et l'Afrique, 100 000 patients de pays en voie de développement se rendent chaque année dans les établissements cubains. Rien que pour les pathologies oculaires, comme la cataracte, 20 000 Vénézuéliens y ont été soignés entre juin 2004 et mai 2005.
De son côté, la Tunisie recense 8 500 médecins dont les diplômes sont reconnus en Europe. Ses cliniques, qui respectent les standards occidentaux, bénéficient de la proximité avec les pays de l'Union. Elles voient défiler un nombre croissant de patients italiens et britanniques, qui s'ajoutent à la clientèle traditionnelle des Libyens et des Algériens. Et les Français? Ils s'aventurent rarement hors de leurs frontières. Sauf pour des actes pas - ou mal - couverts par l'assurance-maladie, notamment la chirurgie esthétique et les soins dentaires.
En sens inverse, la proportion de malades étrangers reste marginale dans les hôpitaux de l'Hexagone. Les démunis du bout du monde ne sont qu'une poignée, chaque année, à décrocher la faveur d'être soignés gratuitement en France. En 2004, on en comptait une trentaine, en majorité des enfants. Des cas d'urgence vitale. Ces décisions, exceptionnelles, sont prises par le ministre des Affaires sociales en personne. Mais la plupart des étrangers qui fréquentent les établissements français financent eux-mêmes leurs soins, avec l'aide, parfois, de leur pays d'origine. Dans le domaine des greffes d'organes, par exemple, 102 patients habitant hors du territoire ont été acceptés et inscrits en liste d'attente l'an dernier, aux côtés de 4 833 résidents. Et si la France avait une place à prendre dans la mondialisation des soins qui s'annonce?
Source : L'express.fr
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